Ou, posé autrement : accepteriez-vous d’un geek qui aurait seulement appris par cœur le dictionnaire médical, qu’il procède à une ponction lombaire sur la chair (hypothétique) de votre chair ?
J’imagine que non. Car le véritable médecin acquiert, par une longue pratique, une compréhension incarnée, vécue, de sa discipline, qu’une connaissance purement lexicale ne saurait évidemment atteindre. Non, il n’y a pas que les mots et leurs définitions statiques. Il y a ce qu’on fait avec, déjà : les phrases, les discours. Et il y a les sensations, les émotions, les sentiments, les gestes et leur indispensable répétition. Le souvenir cuisant de ses propres erreurs. Le plaisir, le désir, le goût, le dégoût, l’intuition…
Mais toute cette expérience sensible tomberait, si ce n’est dans le vide, du moins dans l’océan sans fond de l’hébétude animale (je mets à part votre hamster favori), si elle ne rencontrait, dans sa chute, le réseau serré des mots pour la recueillir. Tout son qu’il est, le mot accumule et organise le sens. Les mots que nous connaissons n’attendent pas, immobiles en nous, d’être prononcés ou entendus. Ils ne nous servent pas qu’à communiquer. Ils nous servent aussi à penser et même à percevoir. Là où je ne vois qu’une jolie fleur, un observateur plus versé que moi en botanique, verra (par exemple) une anémone. La culture grecque de cet observateur pourra lui suggérer qu’étymologiquement, cette fleur s’ouvre au souffle du vent. Alors, une sensation de légèreté, de brise caressante, viendra connoter sa perception. Si sa culture grecque va jusqu’à la mythologie, il se souviendra qu’Anémone est une nymphe, transformée en fleur par la femme jalouse de Zéphir, ce qui épicera les évocations précédentes. Et moi-même, à présent que je me suis renseigné sur son nom, cette fleur, je la vois autrement.
Aux partisans de l’averbal, qui vont répétant dans les séminaires de développement personnel que « 93 % de la communication est non verbale » (étude mal comprise d’Albert Mehrabian, 1971), à celui qui demande si on ne pourrait pas plutôt se passer des mots pour accéder aux choses signifiées, je suis tenté de répliquer : « Commence donc par me questionner sans les mots ; moi, ensuite, je te répondrai de la même manière. » (Saint Augustin, Le Maître.)
Pas plus que la médecine, peut-être, les mathématiques ne se réduisent à leur vocabulaire. Mais pas moins. J’ai pu constater que proposer aux élèves, en début d’année, une minutieuse révision terminologique rendait la suite de leur apprentissage sensiblement plus fluide. Ces fameuses incompréhensions des énoncés, si fréquentes et si déplorées, qu’on prend un peu vite pour de l’inattention ou une forme douce d’illettrisme, ne résultent le plus souvent que de l’ignorance d’une acception ; ne reposent en définitive que sur la mécompréhension d’un seul mot, voire "sur la pointe acérée d'une lettre" (Stella Baruk, L'âge du capitaine). Or, puisqu’on ne parle pas tous les jours à table en langue mathématique, c’est un peu artificiellement qu’il faut se résoudre à lutter contre l’oubli de celle-ci.
Le vocabulaire ici proposé vise à l’exhaustivité : il récapitule tout ce qu'un élève est censé connaître en entrant en seconde. Il n'excepte que les notions qui seront reprises depuis le début dans les cours (fonctions, égalités, trigonométrie). Au bout du compte, tous les théorèmes du collège seront revus.
Le vocabulaire ici proposé vise aussi à vous épargner des efforts inutiles : vous n’avez qu’à vous interroger en lisant la question dans la colonne de gauche, puis en contrôlant votre réponse dans celle du milieu. Si c’est trop de travail pour votre humeur velléitaire, concentrez-vous pour commencer sur le vocabulaire d’algèbre, dont nous aurons vite besoin. Vous pouvez l’apprendre au fur et à mesure que nous avancerons dans le chapitre des révisions d’algèbre.